Entre polar, western et grands frissons

11 H 14 de Glendon Swarthout

Vis-à-vis de Peter Swanson

 

Auteur du polar westernien, 11 H 14, dont nous allons dire toutes les qualités, Glendon Swarthout ( 1918-1992) s'est illustré dans divers genres littéraires. Mais c'est surtout l'un des meilleurs spécialistes de l'Ouest américain. Sept de ses romans ont été portés à l'écran dont Le Tireur, mis en scène par Don Siegel en 1976 sous le titre Le Dernier des Géants (avec John Wayne dont ce fut d'ailleurs le dernier rôle), et l’extraordinaire Homesman réalisé par Tommy Lee Jones en 2014.

11 H 14, écrit en 1979, avait été publié en 1980 dans la Série noire sous le – mauvais – titre Ré-percussions et, plus grave, amputé d'un tiers du texte environ ! Réédité par Gallmeister, le roman retrouve son intégralité et une traduction intelligemment révisée par Marc Boulet.

Auteur new-yorkais de livres pour enfants, citadin inconditionnel et plutôt trouillard, Jimmy Butters va pourtant céder, une fois de plus, à son ex-femme, Tyler, qui le supplie d'aller enquêter au Nouveau-Mexique sur la mort très suspect de son nouveau petit ami.

Pour Jimmy, qui vit dans la 73e Rue, entre Madison et la Cinquième Avenue, le Nouveau-Mexique c'est terra incognita et ploucland réunis... Si la capitale de l’État, Santa Fé, reste fréquentable avec ses nombreuses galeries d'art, Harding, le bled natal de Tyler où le sigisbée d'icelle a été homicidé, est un trou perdu au milieu de nulle part.

Indiquons que si la petite ville de Harding est imaginaire, il y a bien au Nouveau-Mexique un comté de Harding, fondé le 4 mars 1921, le jour de l'entrée en fonctions – d'où son nom – de Warren Gamaliel Harding, vingt-neuvième président des États-Unis. Avec quelque 800 habitants, c'est le comté le moins peuplé du Nouveau-Mexique.

A Harding, où il débarque avec son look de New-Yorkais branché, Jimmy va tomber dans un panier de méchants crabes, avec un shérif pourave, des adjoints qui ne le sont pas moins, et une sombre histoire de vendetta remontant au début du siècle (le XXe...) entre les deux grands-pères de Tyler. Sale temps pour un bobo de la côte Est... Mais de rebondissements en rebondissements, on va remonter le cours de l'histoire et en démêler le tragique maillage.

Les petits tas d'os – et le titre original du livre, Skeletons, prend tout son sens – n'entretiennent pas forcément l'amitié...

Nos chers voisins

Aux États-Unis, le thriller psychologique de Peter Swanson, Vis-à-vis (Gallmeister) a été classé parmi les meilleurs page-turners de ces dernières années (un page-turner est un roman qu'on ne peut plus poser avant d'être allé jusqu'au bout). Et il est vrai qu'on se laisse totalement embarquer dans cette intrigue subtilement distillée, sans avoir l'air d'y toucher, sans que l'auteur ait besoin d'en faire jamais trop.

Illustratrice reconnue, mais psychologiquement fragile, Hen (diminutif de Henrietta en l'occurrence, mais aussi l'équivalent de « poulette » en anglais), a su trouver son équilibre psychique. Grâce à un nouveau traitement, mais surtout grâce à son mari, Lloyd, attentif et rassurant. Hen et Lloyd, qui viennent de s'installer dans une petite ville résidentielle près de Boston, sont invités chez leurs proches voisins, Mira et Matthieu. Des gens plutôt cool et sympatoches. Sauf que Hen va repérer, dans le bureau de Matthieu, un objet directement lié à un meurtre ancien. Un meurtre que Hen a eu à connaître à l'époque et qui n'est sans doute pas étranger à son passif médical.

Pour Hen, aucun doute : Matthieu est fatalement le tueur. Mais, compte tenu de ses antécédents psychotiques, pas facile de convaincre la police. Et même son mari qui craint de la voir retourner à ses vieux démons. Ajoutons à cela que Hen est persuadée que Matthieu sait qu'elle sait...

 

En 2014, Peter Swanson avait publié un premier roman, La Fille au cœur mécanique, qui avait été élu « meilleur premier roman policier de l'année » par le Washington Post. Son second roman, Parce qu'ils le méritaient, best-seller aux États-Unis, a été lauréat du prestigieux New England Society Book Award en 2016.

Même le pourtant très compassé Wall Street Journal n'a pas résisté à la charge émotionnelle de Vis-à-vis : « Peter Swanson déroule son intrigue angoissante avec une assurance et une économie de moyens magistrales. Les rebondissements se succèdent jusqu'à la révélation finale qui électrise le lecteur ». Un lecteur à ce point « électrisé » qu'il regardera différemment ses voisins dorénavant...

Alain Sanders

 

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