Joe Dassin : Cadeau pour Dorothy
Ecrivain, Dassin ? Oui. Aussi…

 

En France on connaît surtout Joe Dassin (qui était un excellent banjoïste soit dit en passant) comme un chanteur de variétés qui nous a quittés beaucoup trop jeune. La publication d’un recueil de ses nouvelles, Cadeau pour Dorothy, vient nous rappeler opportunément qu’il était – aussi – un écrivain américain talentueux, pétri de cette pâte particulière qui est une des spécificités de la littérature nord-américaine.

Etudiant à l’université du Michigan, fils du cinéaste Jules Dassin, il n’était cependant pas un fils à papa et, comme beaucoup d’autres étudiants il tirait le diable par la queue : papa Dassin n’était guère prodigue de ses deniers. Alors il fait des petits boulots, il chante et il joue de la gratte. Ce qu’il chante et ce qu’il joue ? De le folk music. Une influence que l’on retrouvera dans nombre de ses chansons.

Mais il écrit aussi. C’est même sa vocation première si l’on en croit une lettre envoyée à son père : « Je sais maintenant ce que je veux faire : être écrivain. » Il écrit donc des nouvelles et les fait lire autour de lui. L’une d’entre elles sera même publiée par la revue de l’université, Generation.

Le recueil Cadeau pour Dorothy est constitué d’écrits de jeunesse, traduits et publiés pour la première fois en France. La « Dorothy » évoquée là était à l’époque sa petite amie, Dorothy Sherrick, que l’on n’a redécouverte que récemment après qu’elle eut contacté un fils de Joe Dassin via Facebook.

La première de ces nouvelles s’appelle « « Réunion de famille ». La famille de Joe avait fui l’Ukraine (1). Il transpose là l’histoire de cette famille en racontant celle d’une famille venue de Calabre, elle, les Bonani. Cette nouvelle fut écrite pour Dorothy comme cadeau d’anniversaire.

La seconde, intitulée « Gospel », a pour titre original celui d’un negro spiritual de XIXe siècle, Wade in the Water (« Entrez dans l’eau »). C’est l’histoire de la petite Bess. Elle lui a été inspirée par Betty, une jeune Noire qui fréquentait ses sœurs et qui, un jour à Los Angeles, ne fut pas reçue par des voisins des Dassin en raison de sa couleur.

La troisième nouvelle, « Gloire du mouton et bocaux d’olives », relève d’un gimmick de la littérature américaine, à savoir un duo composé d’un petit malin et d’un grosse brute, littérature américaine, dans l’esprit du roman de John Steinbeck, Des souris et des hommes. L’action se passe à Chicopee, en Nouvelle Angleterre, mais elle « sonne » très sudiste et même faulknérienne.

La dernière nouvelle du recueil, « Baleine sur canapé », est inspirée du tournage, en Crête, de Celui qui doit mourir, réalisé par Jules Dassin en 1973. Joe était assistant metteur en scène sur ce film où il tint même un petit rôle. Et il s’amouracha de la vedette du film, la jolie Nicole Berger (remarquée dans Le Blé en herbe aux côtés de Gérard Philipe).

Ce qu’on attend maintenant ? Eh bien, de découvrir d’autres textes – car il y en a d’autres – de Joe Dassin qui était beaucoup plus qu’un simple chanteur à la mode.

Alain Sanders

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(1) Au centre d’émigration d’Ellis Island, on avait demandé au grand-père de Joe de décliner son identité. Croyant qu’on lui demandait d’où il venait, il répondit : « Odessa ». Ce qui deviendra « Dassin » et du coup un nom de famille sur les papiers d’état-civil…

- Flammarion

 
 

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