Sloan Wilson :

L’Homme au complet gris

 

IDans leur belle collection “Vintage”, les éditions Belfond nous permettent de (re)découvrir un best-seller d’après-guerre aux Etats-Unis, L’Homme au complet gris de Sloan Wilson. Traduit dans plus de vingt-cinq langues, ce roman fut adapté au cinéma en 1956. Avec Gregory Peck, Jennifer Jones et Frederick March dans les rôles principaux.

Né en 1920 dans le Connecticut, Sloan Wilson, après des études à Harvard, s’engage dans la Navy. Officier, il est démobilisé à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il est alors journaliste au Time Life, tout en s’essayant à une carrière de romancier, de poète et d’essayiste.

L’Homme au complet gris paraît en 1955. C’est un énorme succès. En France, il est édité l’année suivante chez Robert Laffont et, en 1958, chez J’ai Lu. Il n’avait, aussi étonnant que cela puisse paraître, jamais été réédité chez nous depuis.

Par la suite, Sloan Wilson écrira une vingtaine de romans dont Pour l’amour d’une île (1958), Rollo le Magnifique (1962), Tout l’or des Caraïbes (1971), mais aucun n’approchera le succès de L’Homme au complet gris. Deux fois marié, père de quatre enfants, Sloan Wilson se battra toute sa vie contre son addiction à l’alcool. Atteint de la maladie d’Alzheimer, il s’est éteint en Virginie en 2003.

L’écrivain américain Jonathan Franzen a écrit : “Lire L’Homme au complet gris, c’est un peu voyager à bord d’une vieille Oldsmobile : on est surpris de son confort, de sa vitesse, de sa conduite, et même les paysages familiers prennent une autre dimension”.

Dans leur présentation de Wilson, les éditions Belfond indiquent : “Ce roman s’impose comme le manifeste d’une génération, celle de ces hommes revenus de la guerre pour replonger immédiatement dans le boom des années 1950, partagés entre leurs valeurs familiales et leurs ambitions”.

A New York, dans les années cinquante, the gray flannel suit, “le complet gris”, c’est la tenue quasi obligée de l’Américain moyen. C’est du métro-boulot-dodo : chaque jour, ils sont des milliers qui quittent leurs banlieues-dortoirs pour aller se perdre dans l’anonymat de gratte-ciels sans âme.

Le héros du livre, Tom, est marié. Il a trois enfants. La grande aventure de sa vie, c’est cette guerre qui l’a sorti de la routine professionnelle et familiale. Alors, la paix revenue, il s’ennuie. Chez lui. Au travail. Aussi, le jour où un gros ponte de la télé lui propose un job bien payé, n’hésite-t-il pas une seconde. Quitte à passer des heures au boulot. Au détriment de sa vie de famille.

Il lui faudra du temps, et bien des désillusions, pour s’apercevoir qu’il est en train de perdre sa famille. Il comprendra qu’avant de s’épanouir socialement, il est prioritaire de s’accomplir humainement. Ce que sa femme, Betty, avait essayé de lui faire comprendre :

“Je ne sais pas ce que nous avons, dit Betty un soir. Tu as une assez belle situation. Nous avons trois enfants charmants et bien des gens seraient heureux de posséder une maison comme celle-ci. Nous ne devrions pas être tout le temps si mécontents de notre sort”.

A l’époque, Tom n’en est pas convaincu. Après l’aventure de la guerre, la paix ronronnante, le repos du guerrier, la sérénité d’un foyer, ne lui suffisent pas : le complet gris ne fait pas le poids face au battle dress… Il lui faudra du temps pour admettre que la guerre est finie et que la vie, la vie toute simple, peut être aussi un combat à mener. Et à réussir.

Alain Sanders

 

 

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