Morning Star de Craig Johnson

La bonne étoile du shérif Walt Longmire

 

Avec Morning Star (publié chez Gallmeister), Craig Johnson nous invite à découvrir la 18e aventure (la première, Little Bird, date de 2009) du shérif Walt Longmire et de son complice de toujours (ils ont servi ensemble au Vietnam), l’indestructible Henry Standing Bear, alias la « Nation Cheyenne ».

On rappellera, à l’intention de ceux qui auraient manqué les tout débuts de la saga, que Craig Johnson – avant de devenir un auteur de best-sellers – a été successivement policier, prof de fac, charpentier, pêcheur professionnel. Et puis il s’est installé dans l’Ouest. Sur les contreforts des Bighorn Mountains. Au cœur du Wyoming.

Et c’est là qu’il a installé son héros, Walt Longmire, shérif d’Absaroka, le comté le moins peuplé d’un Wyoming qui est l’Etat le moins peuplé des Etats-Unis. Le petit monde de Walt est devenu le nôtre, ses proches et ses voisins, et aussi son chien (qui s’appelle tout simplement le Chien), et même sa bière favorite, la Rainier (brassée à Seattle, Etat de Washington, depuis 1878).

Quand Lolo Long, la chef de la police tribale, demande à Walt de protéger la jeune cheyenne Jaya, excellente joueuse de basketball, menacée de mort sur les réseaux sociaux, il accepte sans hésiter.

Et d’abord parce que la sœur de Jaya, Jeanie One Moon, a disparu sans laisser de traces un an plus tôt. Venant gonfler la tragique statistique portant sur les femmes amérindiennes victimes de telles disparitions.

Enquêter au sein de la communauté cheyenne, en proie à des rivalités farouches, à des problèmes de chômage, d’alcoolisme, de drogue, de violences familiales, de services de santé et de logements brinquebalants (et on aime que Graig Johnson ne tombe jamais dans l’angélisme indianiste), n’est pas une sinécure. A cela près que Walt peut compter sur l’aide de Henry Standing Bear qui, moralement et physiquement, n’est pas le genre de gus à qui, Blancs ou Indiens, on a envie de se frotter.

On se gardera bien évidemment de dévoiler la progression et les rebondissements d’une enquête à hauts risques. Et encore moins cet indice importun qui, in fine, fera la différence.

Mais on ne se privera pas d’évoquer la descente de Walt et d’Henry dans le Montana voisin, dans la capitale de l’Etat, Billings. Ils sont loin de leurs marques habituelles. Et pas forcément bien accueillis par les autorités locales jalouses de leurs prérogatives territoriales (comme Walt l’est des siennes quand on vient le titiller à Absaroka).

Il y aura aussi leur visite de circonstance, visite elle aussi peu appréciée, dans la Réserve Crow pas mieux lotie que celle des Cheyennes. Même Henry marche sur des œufs et il faudra toute la diplomatie de Walt pour tirer deux infos à des taiseux omertesques.

Tous ces déplacements sefont au rythme du pick-up d’Henry : soixante ans au compteur, il ne peut dépasser les 70 km/h et il est immatriculé 2REZ4U ( à savoir : « trop typique de la Réserve (reez) pour vous »). Un temps long qui donne l’occasion à Henry de philosopher tranquillement :

- Tu veux savoir la différence entre toi et moi, Walt ?
- Vas-y…
- Je ne m’inquiète pas de mourir et un jour je mourrai, tandis que toi tu t’inquiètes de mourir et un jour tu mourras.

On a aussi droit (comme souvent dans les romans de Craig Johnson qui en pince pour les rêves hantés) à du chamanisme amérindien, ce qui n’est pas le plus réussi à mon goût, mais sans que ce tropisme ne ralentisse ce polar qui tourne à cent à l’heure (sauf dans le pick-up d’Henry).

Alain Sanders

 

Tous droits réservés - Country Music Attitude 2025