Alex George : Une symphonie américaine

… et une saga du Nouveau Monde

 

Une symphonie américaine (titre original : A Good American) c’est au départ, l’histoire d’amour de Frederick et Jette Meisenheimer, deux jeunes gens de Hanovre qui émigrent, en 1904, en Amérique. Frederick, reconnaissant à sa nouvelle patrie, n’a qu’un désir : devenir un vrai, un bon Américain (d’où le titre original du livre). Sa femme, Jette, est plus circonspecte.

Pendant presque un siècle, on va ainsi suivre la vie, les peines et les joies, les jours et les nuits de cette famille installée à Beatrice, une bourgade rurale du Missouri. Une vie rythmée par les évènements historiques des Etats-Unis, du début à la fin du XXe siècle.

Cette saga familiale nous est racontée par James Miesenheimer, le petit-fils de Jette et Frederick. La première partie concerne le jeune couple qui a quitté l’Allemagne parce que Jette était enceinte et Frederick pas assez riche pour qu’on l’accepte comme gendre.

A Beatrice, peuplée majoritairement de germanophones, Frederick trouve vite sa place. Moins Jette, nostalgique de sa famille et de sa Prusse natale. Engagé comme gérant du saloon local, le Nick-Nack, Frederick, en pariant sur des combats de boxe à mains nues (et donc illégaux et clandestins), va finir par acheter le bar. Et y programmer des musiciens de jazz.

Quand, en 1917, les Etats-Unis entrent dans le Grande Guerre, Frederick – bien que rien ne l’oblige à le faire – n’hésite pas : l’Amérique est sa patrie, il s’engage. Il est tué dans un coin de la forêt d’Argonne.

Le Middle West est bien évidemment très présent dans ce roman (on fait même une incursion dans les monts Ozarks, repaires de solides rednecks). Mais c’est la musique, sous toute ses formes, qui en est le fil conducteur et, là, le titre français du livre est très judicieux. En Allemagne, Frederick avait séduit Jette en lui chantant des airs d’opéra. En Amérique, il découvre – et dès son arrivée à New Orleans où les deux jeunes gens ont débarqué – la magie du ragtime.

A l’époque de la Prohibition, Jette, désormais jeune veuve et mère de famille, transforme le Nick-Nack, rendez-vous de soiffards privés de carburant, en restaurant familial. Aidée par ses enfants et par un Noir de Louisiane, Lomax (qui fait aussi le bootlegger, ce qui lui sera fatal), elle propose aussi bien de la choucroute que du jambalaya. Les enfants Meisenheimer sont devenus de vrais Américains (et le Nick-Nack va bientôt servir les meilleurs cheeseburgers de la région). Des Américains qui traversent la Grande Guerre, la Prohibition, la Dépression des années 1930, la Seconde Guerre mondiale, la guerre froide, l’assassinat de Kennedy, la guerre du Vietnam, etc.

Le tout, redisons-le, “en musique” comme le souligne USA Today Review : “La musique accompagne la lecture de ce roman – à travers les chansons diffusées à la radio, les ballades et le blues chantés dans le restaurant familial, les arias que le fils de Frederick, Joseph, récite à sa femme”.

On doit déjà à Alex George deux autres romans, tous deux publiés en France, Du côté des garçons (2002) et Les Infortunes de Lucas (2003). Né en Angleterre, il vit à Columbia, Missouri, avec sa femme et ses deux enfants. Il a abandonné une carrière d’avocat pour se consacrer à l’écriture. Le Barreau y a peut-être perdu un ténor, les lecteurs y ont gagné un grand écrivain.

Alain Sanders

– Belfond.

 

 

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