SUR NOS ECRANS

Un grand western : True Grit des Frères Coen

 

Il fallait être aussi gonflé que les Frères Coen pour oser faire un remake de True Grit (en français : 100 dollars pour un shérif) réalisé en 1969 par Henry Hathaway et porté par John Wayne et le chanteur country Glen Campbell. Et le résultat est là pourtant : une totale réussite. Avec trois grands acteurs : Jeff Bridges en vieux marshal bougon, Harlee Steinfield, la gamine qui n’a pas froid aux yeux, Matt Damon, le ranger qui se la pète un peu. Pas de doute : les Frères Coen ont le grit (à savoir le cran, mais aussi le culot).

Quand on demande à Jeff Bridges (remarqué récemment dans Crazy Heart) s’il n’a pas hésité un poil avant de chausser les bottes de John Wayne (à qui True Grit avait valu son seul oscar en 1970), il répond : « Ce n’est pas un remake, c’est un retour à l’original, au livre de Charles Portis paru en 1968. »

Ce n’est pas faux. La preuve, c’est que les Frères Coen font raconter l’histoire, comme dans le livre écrit à la première personne, par la jeune héroïne. Jeff Bridges explique encore : « Pour ne pas être influencé, j’ai commencé par ne pas revoir le film original. Enfant, j’allais voir tous les westerns avec mon père qui rapportait à la maison les accessoires des films avec lesquels je jouais. » Rappelons que son père est l’acteur Lloyd Bridges.

True Grit est le quinzième film des Frères Coen. C’est leur premier western, encore que l’on peut considérer que Fargo et No Country For Old Men étaient aussi des westerns.

Le film débute avec l’assassinat du père de Mattie Ross, 14 ans, tué par un minable, Tom Chaney, qui repart avec des chevaux et deux pièces d’or. Pour retrouver le tueur, la gamine engage Rooster Cogburn, un marshal alcoolo et borgne, réputé être « sans pitié ni merci. » L’alliance de la carpe et du lapin. Et une chevauchée émaillée de coups de gueule homériques entre cette fillette qui n’a pas la langue dans sa poche (après tout, estime-t-elle, Rooster est son employé puisqu’elle le paie) et le vieux briscard mal embouché.

Les critiques qui vont un peu vite prétendent que les Frères Coen se complaisent à faire des portraits de ratés façon The Big Lebowski (1998). C’est ne rien comprendre à la tendresse que les deux frangins ont pour leurs personnages. Et, si on devait les rattacher à de grands auteurs américains, ce serait à ceux-là dont ils disent être friands : William Faulkner, Cliford Odets, Dashiell Hammet.

La fin de True Grit est très différente de celle du film de Henry Hathaway. Beaucoup plus sombre surtout. Parce qu’ils savent que la vie n’est pas un long fleuve tranquille et que les bonnes histoires – et pas seulement les histoires d’amour – finissent toujours mal.

Depuis l’énorme succès de No Country For Old Men, Hollywood qui jusque là les snobait et les tenait pour des farfelus atypiques, leur fait les yeux doux. Et plus encore avec ce True Grit qui, aux Etats-Unis, a drainé des millions de spectateurs. Si cela pouvait contribuer à remettre le western en selle, hallelujah !

Alain Sanders

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