Wiley Cash : Un pays plus vaste que la terre
Dans les montagnes de Caroline du Nord

 

C’est avec beaucoup d’émotions que j’ai lu le roman – c’est son tout premier – de Wiley Cash, Un pays plus vaste que la terre dont l’action se déroule en Caroline du Nord. Mais dans cette Caroline du Nord loin des sentiers battus, au cœur des montagnes, en bordure des Smoky Mountains au Tennessee. Je les ai traversées un jour, en venant de Cherokee, et je me souviens m’être dit alors que je n’aimerais pas être bloqué dans la région pendant la nuit…

Nous sommes à Marshall, à une heure au nord d’Asheville. C’est un bourg apparemment tranquille. Avec son Eglise, l’ancienne Eglise du Christ de French Broad, rebaptisée l’Eglise aux miracles de River Broad. Avec son pasteur, Carson Chambliss, dont on découvrira, au fil du récit, le passé plus que trouble.

Car Chambliss n’est rien d’autre qu’un charlatan. Ses méthodes – sous prétexte de chasser le Diable du cœur des chrétiens de Marshall qui ne sont pourtant pas de grands pécheurs – sont extrêmement violentes. Il leur fait boire du poison en leur expliquant qu’ils n’ont rien à craindre, tenir à main nue des serpents à sonnette, approcher leur visage de flammes en assurant qu’ils ne craignent rien… Inutile de dire que ça fait parfois des dégâts. Mais là-haut, dans les montagnes, on ne fait pas de vagues : ce qui arrive à Marshall ne doit pas sortir de Marshall

Il y aura pourtant la « bavure » de trop. La mort, à la suite d’une imposition des mains musclée, du jeune Christopher, un gamin muet à qui Chambliss a prétendu pouvoir rendre la parole.

A travers les récits de Jess, le frère cadet de Christopher, d’Adélaïde, qui a tout fait pour tenir les enfants de Marshall à l’écart de Chambliss, de Clem Barefield, le shérif, blessé à vie par la mort tragique de son fils vingt ans plus tôt, on découvre peu à peu les coulisses du drame. Ce n’est pas si facile : au cœur des Appalaches, on se méfie des étrangers, même si Clem y est installé depuis des années.

Dans le magazine littéraire Kirkus Review, on a écrit : « Avec ce premier roman, Wiley Cash se lance à la découverte des terres de Faulkner et O’Connor. Doté d’une force d’évocation rare, un formidable roman sur l’amour, la destinée et la rédemption. »

La force d’évocation évoquée là est incontestablement due au fait que Wiley Cash, originaire de Caroline du Nord, connaît bien ces petites communautés des Appalaches et qu’il s’interdit de les juger.

On sera sensible aussi à la relation père-fils entre Jess et son père. Ensemble, ils écoutent de la country à la radio : « J’ai tout de suite reconnu Patsy Cline. Papa met tout le temps ses disques et, après, il essaie de convaincre maman de danser avec lui. Il dit qu’il n’y a jamais eu de voix plus douce et plus triste dans les montagnes. » Patsy Cline, originaire elle de Winchester dans la Virginie voisine.

Le faux prophète sera puni. Jess le sait bien qui a lu l’Ancien Testament : quand le peuple élu a appelé le Seigneur à l’aide, Il les a entendus : « Nous, on l’a toujours la foi, et je sais que le Seigneur va nous sauver, que c’est dans Ses plans. » Amen !

Alain Sanders

- Editions Belfond.

 
 

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