Kristin Kimball : Une vie pleine
Une femme, un homme, une ferme…

 

Au départ, Kristin Kimball est une journaliste new-yorkaise âgée de trente ans. Elle va vivre deux histoires d’amour. La première, avec Mark, un jeune fermier rencontré à State College en Pennsylvanie. La seconde, avec la terre d’une ferme de cet Etat. Au point d’oublier New York, son job de journaliste et de s’impliquer totalement dans l’exploitation agricole.

En ouvrant le livre, on se dit que l’on va découvrir l’histoire d’une citadine un peu bobo qui va nous la jouer genre Marie-Chantal à la ferme. Et puis on se plonge dans le récit de ces deux histoires d’amour et on adhère totalement. De son Mark (qui donne un peu trop dans la nouvelle vache sacrée de notre époque, le bio, mais bon …), elle écrit : « Le regarder me remplit d’admiration et de désir, une groupie devant une rock star. Il a choisi un morceau de premier choix du bœuf que nous avons tué cette semaine et monté un assortiment de légumes du cellier. » De sa terre, elle dit : « Ce lopin de terre est un monde. Quelles réponses la terre m’a-t-elle apportées ? Seulement la confirmation qu’il existe des réponses. Sous la terre, il y a du roc et, si vous creusez assez profond, vous l’atteindrez. C’est la seule chose que je considère comme une certitude et cela me suffit. »

On est là face à une réussite « à l’américaine ». Pas un truc brinquebalant façon ces baba cools qui, naguère, allèrent faire du fromage de chèvre dans le Larzac, s’habiller de tricots informes et trimballer des arpions douteux dans des sandales fabriquées avec des pneus… (1).

Mais il n’en reste pas moins que Mark et Kristin ont un petit côté – Pennsylvanie oblige – amish : fertilisation avec du compost et des engrais verts, ni pesticide, ni herbicide, cultures diversifiées, utilisation de chevaux pour le labour, etc. Une érablière. Un verger. Des pâturages. Des prairies de fauche à foison. Des jardins d’herbes aromatiques et de fleurs. Traite des vaches à la main. Des cochons, des bœufs, des poules de plein air.

De quoi servir une clientèle d’une centaine de personnes qui, tout au long de l’année, peuvent acheter du bœuf, du porc, du poulet, des œufs, du sirop d’érable, des céréales, des farines, des haricots secs, des aromates, des fruits et quarante variétés de légumes. Et ça paie : chacune de ces cent personnes versent au couple 2900 dollars par an. Une belle petite entreprise qui ne connaît pas la crise.

Ce qu’il y a de sympatoche dans cette histoire, c’est que Kristin s’y est mise à fond. Elle a appris à tirer au fusil, à dépecer un poulet, à manier les chevaux. Et aussi à écouter la country music diffusée par les radios locales. Ne serait-ce que pour ça, on est prêt à lui pardonner quelques naïvetés d’ex-fille de la ville qui découvre ce que les paysans savent depuis des siècles et qu’elle traduit ainsi : « La terre prend racine en vous ; à côté, tout le reste paraît dérisoire. » Il y a beaucoup de tendresse(s) dans cette aventure. Et ce n’est pas le moindre de ses charmes.

Alain Sanders

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(1) De sa période côte Est, Kristin Kimball a tout de même gardé un tic : celui d’émailler son récit de mots français…

- Editions Fleuve Noir.

 

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