Freddy Powers

Nous pourrions commencer en vous disant que, malgré la pluie, l’édition 2008 des Equiblues de Saint-Agrève a dans sa partie équitation western et rodéo – qui reste sa marque, unique en France – fait le plein. Et saluer l’animateur de ces épreuves, Mike Sandios, sans qui cet événement ne serait pas ce qu’il est. En signalant que, cette année, un bullrider et un bullfighter (ce qu’on appelle les « clowns de rodéo ») ont été blessés par un taureau roux méchant comme une teigne. Ce qui est venu rappeler, à ceux qui ne l’auraient pas encore compris, que le rodéo n’est pas un « spectacle » de cirque mais une activité éminemment dangereuse. Et pratiqué par des hommes qui en ont dans les chaps…

Philippe Lafont

Mais, amour de la country music oblige, nous insistons d’abord sur les deux temps forts des concerts sous l’immense chapiteau où, déluge du ciel ou pas, on se réchauffe dans une belle ambiance de honky tonk.

Premier temps fort : Freddy Powers. Cet homme, invité par Philippe Lafont qui l’an dernier nous avait fait le cadeau de Gary P. Nunn, est une légende. Chanteur, songwriter, parolier de Willie Nelson, George Jones, Merle Haggard, les Wilburn Brothers, Pauline Reese, Big & Rich, etc., est un chantre de la real thing comme le rappelle la dernière chanson qu’il a écrite pour Scotty Joss, Back Playing Honky Tonk Again ("Retrouvons l’esprit honky tonk").

Aujourd’hui atteint de la maladie de Parkinson, il a plus d’une heure durant, appuyé par le groupe Stop The Truck (qui se sont produits eux aussi sous le chapiteau), littéralement scotché le public. Au point que les habituels remueurs de popotins qui, indifférents souvent au cadeau qu’on leur fait, à savoir des chanteurs en live, ont arrêtés de se trémousser pour écouter ! Un moment rare. Un moment de grâce. La magie de la country music tradi qui est passée, comme sur les ailes d’un ange, sur tous et chacun. « C’est la première fois que je vois une telle communion aux Equiblues », nous confiera Sylviane Lafont qui est elle-même l’ange tutélaire de ce festival rodéo et country music.


.................Sylviane Lafont

L’autre temps fort, ce fut Kevin Fowler. Un Texan de chez Texan ! Et plus que ça : un rebelle. Il nous a chanté tous ses grands succès, à commencer par Beer, Bait and Ammo qui lui a valu d’être connu et qui a été repris par Sammy Kershaw et Mark Chesnutt. Mais on a eu droit aussi à The Lord Loves The Drinkin’ Man, Speak of the Devil, Loose, Loud & Crazy, Ain’t Drinking Anymore, Not Lovin’ Anymore, etc. Mais aussi l’excellent Don’t Touch My Willie, ce qui veut dire : « Ne touche pas ma zigounette ». Inutile de dire que lorsqu’il chante cette chanson en public aux Etats-Unis (procurez-vous son album Live at Billy’s Bob, Texas, vous verrez ce que je veux dire), ça provoque dans les salles un véritable délire, proche de l’émeute…

Mike Sandios

Et l’on enrage que ce morceau d’anthologie soit passé au-dessus de la tête du public français qui n’entrave que « couic » à l’anglais. Il aurait donc fallu, plutôt que de rester dans des banalités généralistes (déchiffrées sur un bout de papier) sur la carrière de Kevin, un présentateur pour souligner le sel – et la Political Incorrectness (c’est le titre d’une des chansons de Kevin, en duo avec Mark Chesnutt) – de cette chanson. Redisons-le : la country, à la différence de la pop, ce n’est pas du bouzin pour faire danser les foules, mais des textes puissants. N’en pas comprendre le sens, c’est rater 90 % de son authenticité.

Kevin Fowler et Alain Sanders

Faut-il parler des autres ? Sans doute. Et d’abord des belles prestations des groupes français Big Rock, Range Heroes et Blue Quittach (du solide bluegrass). On a moins été convaincu par Maren Morris, 17 ans, et ses sidemen : une sympathique bande d’ados qui font de la musique. Mention bien, en revanche, pour Brian McComas (pour un type né dans le Maryland, c’est pas mal), Mark McKinney, Carrie Rucker, Kacey Mustgraves (du honky tonk de qualité), Shannon Lawson (une découverte). Mais il faut qu’ils comprennent que la country ce n’est pas du rock et qu’un batteur country ne doit pas éclipser le chanteur sous des percussions qui écrasent tout.

Carry Rucker

Kevin Fowler

Les Equiblues de Saint-Agrève, qui sont le grand rendez-vous rodéo & country du mois d’août, sont devenus une référence. Le public, connaisseurs et néophytes, avait une fois de plus, malgré le temps menaçant, répondu « présent ». Alors ? Alors rendez-vous l’an prochain of course !

A.S.

Maren Morris

Shannon Lawson

Photos S.B.

Kevin Fowler pendant la balance

Kevin Fowler en simple spectateur

Mike Sandios et Sabine Benichou

Photos Pierre Dimech

Les Equiblues de Saint-Agrève : http://www.equiblues.com