American Dream : le plus célèbre briquet du monde, le Zippo

Le premier briquet Zippo à coins carrés date de 1932. Il avait été façonné à partir d'un tube de laiton massif rectangulaire. Les pièces de dessus et du fond étaient soudées au tube afin de former le couvercle et la base de la coque.

En 1933, le Zippo s'affine. Des lignes diagonales sont créées en travers des angles du couvercle et du fond du briquet. Mais ce sont les années 35-36 qui feront franchir au Zippo un pas décisif.

A partir de ces années-là débute la spécialité des cadeaux d'affaires et publicitaires : les marques des acheteurs sont dessinées sur de petites plaques métalliques peintes et collées sur la coque. En 1936, la charnière du briquet est déplacée de l'extérieur vers l'intérieur. Ça fait plus chic…

En 1939, un " must " : un Zippo en or massif 14 carats, disponible à la fois dans le modèle brillant et le modèle guilloché. Ce n'est pas, on s'en doute, ce briquet en or qui sera dans le paquetage des soldats en 1943… Suite au manque de laiton et de chrome, les coques sont réalisées dans un acier poreux et recouvertes d'une peinture " epoxy " noire.
Les briquets Zippo, introduits en France par l'armée américaine lors du débarquement, sont les répliques du modèle 1940. A cette époque, le laiton était exclusivement réservé aux industries de guerre. Zippo fut donc contraint

de fabriquer dans un alliage de mauvaise qualité et de finition médiocre, d'où l'idée de le peindre en noir. Aujourd'hui, les modèles commémoratifs sont en laiton massif, avec peinture cuite au four.

Le Zippo a immédiatement été adopté par les différents corps d'armée. Par la marine, qui s'en sert comme d'un véritable briquet-tempête. Par l'aviation qui apprécie que l'absence de pressurisation ne gène pas l'allumage de ce briquet-miracle. Pour l'armée de terre qui s'est aperçue que réunis par quatre, les Zippo constituaient le réchaud rêvé…

La guerre terminée, Zippo a conquis le monde. Et revêtu, pour la circonstance, un habillage en nickel argenté. En 1947, des dessins apparaissent sur les coques : des chiens, des chevaux, des canards, des truites… Ces dessins sont, historiquement, les premiers à être faits à partir de pochoirs, peints au pistolet et passés au four.
La guerre de Corée va redonner — si on nous passe l'expression — une nouvelle flamme aux Zippo. On fabrique les coques à partir d'acier et il faudra attendre fin 53 pour retrouver le laiton massif chromé cher à la paume des connaisseurs.

En 1956, d'ailleurs, ces connaisseurs vont faire la fine bouche : un modèle " slim " (modèle étroit) est créé. Il ne fait pas l'unanimité. Les femmes, en revanche, font bon accueil à ce modèle moins " baroudeur " que les autres. Quatre ans plus tard, le " slim " a gagné droit de cité et de carénage en or massif 14 carats.

Aujourd'hui, encore, les collectionneurs sont sceptiques : " Mmouais, le "slim"… Encore qu'ils aient fait une série représentant les signes du zodiaque disponibles exclusivement sur le modèle "slim" en 1970… On peut légitimement préférer la série NASA… ".

En 1969, en l'honneur du premier pas sur la lune, un briquet fut créé. Une série qui continuera jusqu'en 1980 avec le dessin de la navette spatiale.
Il y a de grandes dates comme ça. 1972, par exemple, avec la création de briquets pour la Division Nationale de football américain. Ils sont tous là : les " Steelers " de Pittsburg, champions du monde 74-75, les " Cow-boys " de Dallas, les " Jets " de New York, les " Rogues " de Memphis, les " Raiders " d'Oakland…

En 1976, pour le bicentenaire des Etats-Unis, Zippo réalise, en " slim " et en modèle classique, un briquet de toute beauté. Cette année 76 voit d'ailleurs apparaître la série des " Golden Elegance " et celle des " Denim " qui vient appuyer le succès jamais démenti des blue-jeans.

Pour quel Zippo a-t-on le plus de tendresse ? Plusieurs… Pour ceux qui représentent des badges de l'armée US, par exemple. Ou encore ces deux-là qui datent de 1980 : à l'occasion des élections présidentielles, Zippo avait eu l'idée de créer deux nouveaux dessins, un éléphant pour les Républicains et un âne pour les Démocrates. Et puis j'ai une affection particulière pour celui-ci qui n'est qu'une copie — mais une excellente réplique en l'occurrence : sur fond de drapeau sudiste, un " rebel " proclame " the South will rise again " et quand on l'ouvre, une musiquette nous joue un " Dixieland " du meilleur effet…

Et en 1982, pour son cinquantenaire, Zippo a-t-il pensé à s'auto-commémorer ? Bien sûr ! Ils ont reproduit le dessin original du briquet laiton massif décoré des premières lignes diagonales qui datent en fait de 1933 — avec l'inscription devise : " Fifty years and growing stronger ".
Il faudrait encore parler du Zippo spécial pour les fumeurs de pipe, de ceux commémorant les présidents des Etats-Unis, de tous les objets — petits couteaux de poche, mètres, porte-clefs, pince-billets — créés par la marque, de l'apparition en 1986 du modèle " Contempo " qui n'a plus rien à voir avec le rude objet né à Bradford en 1932…
Il y a une dérive. Mais ce n'est pas l'important. Ce qui compte, c'est la saga de ce briquet. Son caractère légendaire. Pensez, il y a des Zippo de plus de trente ans qui fonctionnent encore parfaitement. Après avoir été retapés, deux, trois fois. Et toujours gratuitement.
Gratuitement ? Oui. C'est même le slogan du Zippo : " They work always… or we fix them free " (" Ils marchent toujours… ou on les répare gratuitement ").

Alain Sanders

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