Un de nos cowboys préférés : Steve McQueen dans son rôle-fétiche, “Joss Randall, chasseur de primes”

Il est des musiques de films que l’on n’oubliera jamais. Celle du Train sifflera trois fois. Ou du Troisième Homme. Des Sept Mercenaires. Ou de la série des “James Bond 007”. Celle, bien sûr, de la série de Steve McQueen, Wanted dead or alive (Au nom de la Loi) où l’on voyait Joss Randall, la Winchester à canon scié aux côtés, s’avancer jusqu’à une affiche “Wanted” et la déchirer.

A l’origine de la série Au nom de la Loi, un film-pilote intitulé The Bounty Hunter (Le chasseur de primes). Steve McQueen s’y fait remarquer par Vincent Finnelly, un producteur employé par la “Four Star Company”. Finnelly dira plus tard :
— Je l’ai choisi parce qu’il était un homme ordinaire. Vous savez, un chasseur de primes est un pauvre type. Tout le monde est contre lui, sauf le spectateur. Et Steve McQueen n’était pas une beauté mais il avait une espèce d’instinct animal, il pouvait ronronner et montrer ses griffes en même temps.
D’où l’idée de montrer un héros qui, du fait même qu’il est intéressé par l’argent, n’est pas loin d’être un anti-héros. Si l’on veut bien se souvenir que la série débute aux USA en septembre 1958 (il y aura en tout 94 épisodes), cet “amoralisme” relatif a quelque chose de révolutionnaire, préfigurateur des westerns à venir dix ans plus tard.
 

Mais l’”amoralisme” de Josh Randall est, nous l’avons dit, relatif. Dans l’un des épisodes, “Les deux sinon rien”, on voit Joss reverser discrètement la prime qui lui revient à la veuve d’un shérif tué dans l’action. Le shérif-adjoint s’étonne :

— J’ai entendu beaucoup de choses sur vous, Joss. Et plutôt du mal. Pourquoi voulez-vous que votre geste reste anonyme ? Connu, il vous rendrait plus populaire...
— Peut-être, répond le chasseur de primes. Mais je ferais aussi moins peur...
En France, nous ne découvrirons Joss Randall qu’en 1963. Le succès sera énorme : la série est diffusée le samedi soir à 20 h 30, on vend des milliers de panoplies Au nom de la Loi, la Winchester à canon scié est plébiscitée par les gamins et les cours de récréation s’enrichissent d’un nouveau jeu qui consiste à traquer les rascals pour les ramener “morts ou vifs”...
“J’ai tout de suite aimé le caractère de Joss Randall. Comme moi, c’est un solitaire, un errant, un type qui a le goût du danger. Pour entrer dans sa peau, j’imaginais ce qu’il aurait fait dans telle situation, puis j’y ajoutais ce que j’aurais fait moi personnellement. Si les gens se sont pris de sympathie pour Joss Randall, c’est parce qu’ils ont vu en lui, non pas un héros en bronze et en or, mais un homme en chair et en os, capable d’avoir du courage mais aussi d’avoir la frousse.” (in Steve McQueen de Philippe Ferrari, éditions Solarstar).

Steve McQueen tenait à ce que son personnage soit le plus authentique possible. Il ne voulait pas interpréter un cowboy typique tels qu’ils étaient idéalisés à l’époque. Il le voulait profondément humain et sut le rendre attachant. Il insista notamment auprès de la production pour que Joss Randall demande la prime à la fin de chaque épisode. Dans l’un d’eux, ayant été obligé d’abattre son commanditaire (un infirme en fauteuil roulant !), il va même jusqu’à la réclamer à l’homme qu’il était chargé d’arrêter. C’était une façon de montrer que son personnage n’était pas à l’abri des contingences matérielles. Il ne voulait pas non plus qu’il soit une sorte de superman et, quand le nombre de ses adversaires était trop élevé, il préférait ne pas lui faire relever le défi mais plutôt attendre son heure pour leur régler leur compte un par un. Il

n’intervenait jamais pour stopper une bagarre de saloon si ça n’entrait pas dans le cadre d’une de ses missions... sauf s’il était bousculé !

Il soumit à la production quelques suggestions pour personnaliser Joss Randall et, après l’obtention des différentes autorisations légales, on put lui transformer une Winchester modèle 92 en sciant la crosse et le canon. Résultat, la puissance de l’engin était telle que le souffle faisait parfois voler les pages de scénarios que la scripte tenait dans ses mains. L’arme devint le symbole de la série et McQueen s’entraîna énormément afin de maîtriser l’engin et finir par devenir un expert dans le maniement de sa Winchester. Il arrivait en moins de six secondes à vider les six balles de 44 du magasin. Il participa même à des compétitions et se hissa parmi les quatre meilleurs tireurs de la côte Pacifique. Il imposa également ses vues à Dick Powell au sujet de son cheval, à qui il reprochait d’être trop flegmatique. Chez un ami éleveur, il jeta son dévolu sur un magnifique sang-mêlé à la robe noire qui répondait au nom de Ringo.

Pour couronner le tout, il dénicha un vieux cowboy à qui il acheta le chapeau qui le suivra pendant toute la série. Alors que “Wanted dead or alive” n’est déjà plus qu’un souvenir pour les Américains, c’est en France que Steve McQueen revient une dernière fois vers son personnage, le 16 septembre 1964. Invité par Télé 7 jours, il assiste en effet à la vente aux enchères de sa fameuse Winchester au profit du “Mouvement pour les villages d’enfants”. C’est Gilbert Bécaud qui en fera l’acquisition pour la somme de 15.000 francs de l’époque.
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